De l’utilité de la chasse à courre

La chasse à courre est-elle utile ? Voilà bien une question soulevée par ceux qui souhaitent y répondre par la négative : non, la chasse à courre ne serait pas utile car elle tue peu d’animaux. L’incompréhension qui préside aux relations entre les chasseurs et leurs opposants se trouve résumée dans cette phrase qui se voudrait une démonstration.

Tout d’abord, pas un chasseur à courre, à tir, au vol, sous-terre ou à quoi que ce soit d’autre ne chasse parce que c’est utile, ni même pour « tuer ». Il chasse parce que le mode de chasse qu’il pratique l’intéresse, le délasse, le passionne, lui permet de retrouver des amis, sa famille, ses voisins, et mille autres raisons ; mais pas un seul ne part à la chasse en se disant : « je vais faire quelque chose d’utile ».

Certes la chasse est utile ; elle assure la régulation de la faune sauvage et, par là même, la possibilité de voir cohabiter dans un même espace les activités des hommes (agriculture, sylviculture, urbanisation, circulation routière et ferroviaire) et des animaux sauvages. Mais cette utilité n’est que la conséquence d’un prérequis : l’intérêt de certains de nos contemporains pour la pratique de la chasse.

Au chapitre du rendement, reconnaissons que la chasse à courre est moins efficace que la chasse à tir. Une journée de vènerie conduit à la prise d’un animal une fois sur quatre, quand une journée de chasse à tir voit généralement plusieurs animaux au tableau. Il faut donc croire que l’utilité n’est pas le critère qui prévaut à la perpétuation de la vènerie, et c’est tant mieux. Car si l’on devait apprécier la persistance d’une activité humaine à son utilité, que deviendraient nombre de nos loisirs ? Utiles le football, les vacances à l’autre bout de la terre, ou la pratique du ski ? Utiles la navigation de plaisance ou les jeux électroniques ? Et surtout qui pour décider que telle ou telle activité est « utile » ?

Ce qui est « utile » à proprement parler, c’est de travailler, se nourrir et dormir, pour ensuite recommencer. Beau projet que nous proposent ces chantres de l’utile, dont certaines dictatures d’Asie nous offrent d’excellentes illustrations ! En réalité, il y a une certaine curiosité à nous proposer de passer nos activités au prisme de l’utile dans une époque qu’on qualifie fréquemment de civilisation des loisirs.

Question primordiale qui sous-tend la plupart de nos débats de société : la relation du travail et du temps libre, la place des loisirs dans l’accomplissement individuel et l’aliénation résultant jadis de l’organisation industrielle du travail. Il est heureux que les progrès techniques aient permis à l’Homme de dégager du temps libre pour exercer des activités extra-professionnelles qui lui procurent épanouissement, bien-être et bonheur : se rencontrer, échanger, collaborer pour se cultiver et devenir meilleur.

Et c’est bien là ce que procure la vènerie : un épanouissement par la rencontre et la connaissance jamais satisfaite du monde sauvage. La vènerie est une véritable culture dont nous sommes les dépositaires. Sachons la pratiquer avec une éthique irréprochable et la transmettre aux générations futures dans sa plus belle expression.

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