Tous les mercredis soir, les sonneurs de trompe de chasse se réunissent sous les arches du pont Wilson. Un lieu choisi pour son acoustique et son cadre exceptionnel.
La trompe de chasse autour du cou, Jérôme Flu, président de l’association Les Échos du Val de Luynes , donne le tempo avec sa main et chante la fanfare (l’air de musique). Sorte de répétition générale avant de faire parler la puissance des trompes sous une arche du pont Wilson de Tours, côté Saint-Cyr-sur-Loire. Un rituel que les sonneurs reproduisent tous les mercredis soir.
« Le groupe qui se réunit ici est assez ancien. Il date de la fin des années 70 et début 80. Ils sonnaient auparavant sous un autre pont et côté guinguette , rembobine Guillaume Greffier, sonneur de trompe. Il y a une bonne résonance sous le pont… Et la vue n’est pas mauvaise ». Ce soir-là, ils sont une quinzaine à s’être rassemblés pour jouer ensemble. « Nous sommes tous des veneurs (personne pratiquant la chasse à courre) et chasseurs », expliquent les participants. Un détail qui ne doit rien au hasard.
La trompe de chasse est l’instrument de communication lors de la chasse à courre. À chaque action de chasse correspond une fanfare spécifique. « Ça fait onze ans que je chasse à courre et tous les mercredis soir je viens ici , raconte Géraud Coffinières de Nordeck, sonneur depuis ses 15 ans. C’est la trompe qui m’a amené à la chasse ». C’est la musique qui l’a amené à chasser, pas l’inverse. « J’ai commencé à sonner tout seul dans mon coin. Ce sont des gens à Lyon qui m’ont donné des conseils », raconte le sonneur.
La trompe est un instrument particulier. Longue de 4,545 m, elle est enroulée pour pouvoir mieux se transporter à la chasse. « En France il y a sept fabricants différents. Chaque trompe est faite à la main. Là si on regarde sous le pavillon on peut voir tous les coups de marteau », explique Jérôme Flu. Un instrument qui peut être difficile à appréhender et qui ne se joue qu’avec le jeu du souffle et du pincement des lèvres.
Inscrit au patrimoine culturel immatériel
Pour favoriser l’usage, certains en font même fabriquer des sur-mesure. Pour des prix allant de 500 à 2.500 voire 3.000 €. Mais généralement, les sonneurs l’assurent : « c’est un instrument qui se transmet ». Armel a récupéré la trompe de sa mère qui sommeillait dans un coin de la maison. Et depuis six mois il vient donner au pont Wilson des allures de chasse à courre : « J’ai découvert ça par hasard avec une vidéo sur Instagram »
Les vidéos des répétitions circulent sur les réseaux sociaux. « Nous voyons beaucoup de gens qui s’arrêtent, qui viennent filmer et qui nous posent des questions. C’est totalement différent de ce qu’ils ont l’habitude de voir. Ils connaissent peu », explique Géraud Coffinières de Nordeck. Pourtant l’art de sonner la trompe de chasse a été inscrit au patrimoine culturel immatériel de l’Unesco en 2020. Une reconnaissance pour les sonneurs, dont l’un des gros contingents vient de la région Centre-Val de Loire.